Interview Violent Solutions
Octobre 2001

VS1. Revenons sur le concert tribute à Chuck Schuldiner auquel vous avez participé en décembre dernier. Peux tu m'en dire un peu plus sur ce show ? Quelle reprise de Death avez vous interprété. Que représente Chuck pour un groupe de Black comme vous ?
Hreidmarr : Tout d'abord, nous ne nous considérons pas comme un groupe de Black Metal, au sens strict du terme. Ce style à pour moi ses règles, ses codes à respecter, c'est quelque chose de fermé, que je ne remets absolument pas en question, étant moi-même fan de Black old-school. Mais il se trouve qu'avec Anorexia Nervosa, nous transgressons ces règles, nous avons notre propre style, et n'essayons pas de " coller " à un style particulier, nous faisons juste la musique que nous avons envie d'entendre.
Nous sommes tous impliqués dans la scène depuis pas mal d'années, Stefan et Nilcas ont commencé à jouer ensemble en 1989. A l'époque, la scène extrême était plutôt réduite, et forcément, des personnages comme Chuck Schuldiner ont eu une importance capitale dans l'évolution de celle-ci, et ont de ce fait marqué les esprits. Nous avons repris Open Casket lors du festival, car nous préférons les vieux titres de Death, ce sont les plus violents et primaires...

VS2. Comment vous êtes vous intégré parmi tous les autres groupes francais backstage qui vous découvrait peut être ?
N'étant pas vraiment des nouveaux venus, nous connaissions déjà très bien la plupart des groupes présents, nous avions déjà joué avec pas mal d'entre eux, cela s'est donc bien passé. Nous avons eu le grand honneur, par contre, de faire la connaissance de Christian Augustin, chanteur du défunt Sortilège.

VS3. Quels ont été vos autres activités au cours de ce début d'année avant l'enregistrement de ce nouvel album ?
Nous avons participé à quelques festivals, notamment le No Mercy en Belgique et aux Pays-Bas, aux côtés de Mortician, Vader, Bal-Sagoth, Mystic Circle, Marduk, God Dethroned, Benediction, etc. Mais nous nous sommes surtout concentrés sur New Obscurantis Order, c'est un album qui nous a demandé énormément de travail, aussi bien au niveau de l'écriture que des arrangements, de la préproduction, etc.

VS4. Vous avez produit vous même ce nouvel album. Quels sont les avantages de l'autoproduction et les inconvénients selon vous ?
Si nous avons tenu à produire nous-mêmes New Obscurantis Order, tout comme nos précédents disques, plutôt que de faire appel à un producteur de Metal renommé, c'est d'abord pour éviter de sonner comme la grande majorité des groupes européens. Aujourd'hui, la plupart des albums qui sortent des grands studios à la mode ont certes une bonne production, mais mais manquent cruellement de personnalité, le producteur s'en tient à appliquer une " recette ", le son est formatté, marqué du sceau du Fredman, de l'Abyss, ou du Soundsuite. A l'inverse, notre volonté d'aller jusqu'au bout des choses nous pousse à élaborer notre propre son, un son qui nous ressemble, qui est tout de suite identifiable pour l'auditeur. C'est un processus que nous avons entamé avec Sodomizing the Archedangel, puis Drudenhaus, et que nous avons parfait sur New Obscurantis Order. Nous ne voulions pas d'une production clinique, sans âme, nous voulions quelque chose de puissant, écrasant, une production qui soit au service de la musique et de ses ambiances, et non l'inverse. Et je dois dire que le résultat dépasse nos espérances...
De plus, nous ne pouvons pas nous permettre de rester seulement deux semaines en studio, un album tel que New Obscurantis Order nous a pris plus de trois mois à enregistrer. Or pour des raisons évidentes de budget et de planning, nous ne pourrions pour l'instant pas reserver un studio digne de ce nom pour autant de temps.
Nous préférons donc tout superviser, et cela présente bien evidemment des inconvénients, enregistrer et produire sa propre musique est à chaque fois très éprouvant, surtout lorsque l'on reste si longtemps en studio. Cet album nous a vraiment épuisé, vidé, mentalement et physiquement. Nous y avons mis toutes nos tripes, et je pense que cela se ressent à l'écoute.

VS5. Dans quel état d'esprit étiez-vous avant d'entrer en studio ? Calmes, sûr de vous, ou encore hésitants sur la structure finale de certains titres ?
Nous nous laissons toujours une légère marge d'improvisation en studio, même si les morceaux ont tous été maquettés plusieurs fois auparavant. Nous ne sommes pas le genre de groupe qui met deux bons titres sur un album et comble le vide avec des morceaux de remplissage composés à la va-vite en studio... Donc, nous savions où nous allions, nous avions confiance en nos morceaux, même si on ne peut jamais vraiment prévoir exactement à quoi ressemblera le produit final.

VS6. Comment comparerais tu New Obscurantis Order à Drudenhaus et à votre tout premier album ?
Exile, notre premier album, est un peu à part dans notre discographie, je pense donc qu'il n'y a aucun point de comparaison, si ce n'est une attitude, un fond nihiliste, sans espoir.
Quant-à Drudenhaus, c'était un album très spontané, exalté, nous ne nous étions pas soucié du rendu final, nous avions enregistré les titres de notre répertoire qui nous plaisaient le plus, sans nous poser de questions, et nous voulions surtout botter le cul d'une scène française en léthargie totale. L'ambiance, tout comme la production de cet album, la manière de jouer, de chanter, tout était très hystérique, c'était une violente décharge d'énergie, quelque chose de très éjaculatoire.
En Comparaison, New Obscurantis Order est plus posé, plus froid, même si je le trouve plus violent que Drudenhaus. Mais ici, la violence s'exprime différemment, elle est plus insidieuse. A la différence de Drudenhaus, nous avons pensé cet album comme une oeuvre achevée, accomplie. Il n'y a rien d'innocent dans New Obscurantis Order, chaque morceau est à sa place, et contribue à mettre en place un climat, une ambiance que nous voulions continue de la première à la dernière note.

VS7. Votre nouvel album se veux encore plus puissant et rapide que tout ce que vous avez fait, sans renier votre coté orchestral et violent. Vos attentes sont grandes suite à cet enregistrement ? Quels sont vos objectifs?
Oui, nous attendons beaucoup de cet album, Drudenhaus nous a permis de nous faire un nom au niveau international, et nous voulons enfoncer le clou avec New Obscurantis Order ! Nous avons le soutien total de notre maison de disques, et espérons prouver que la France peut encore mettre le monde à genoux ! ! !

VS8. Vous deviez partir en tournée avec Arkhon Infaustus et Enthroned, mais vous êtes finalement absent de l'affiche. Peux tu en donner les raisons ? Avez vous d'autres tournées de bookés ?
Nous étions en négociation pour cette tournée, mais pour différentes raisons, cela n'a pas abouti. Aucune date n'est bookée pour le moment, mais nous pensons tourner en France et en Europe d'ici la fin de l'année.

VS9. Que représente le live pour Anorexia Nervosa ? Essayez vous de restituer ce qui est joué sur disque note par note ?
Non, nous adaptons plutôt nos morceaux à la scène. Bien sûr, nous pourrions comme tant d'autres nous contenter d'utiliser des bandes pré-enregistrées, mais nous tenons beaucoup au côté live, et préférons tout jouer nous-mêmes à 100%. Mais évidemment, cela représente énormément de travail, surtout pour Xort notre claviériste, qui doit parvenir à coller le plus à l'album, sur lequel on trouve parfois plus de vingt pistes de violons, des cuivres, etc. A chaque fois, il faut tout reprendre à zéro, et trouver le juste équilibre qui fait que cela reste jouable en live, tout en retranscrivant fidèlement les atmosphères de l'album. D'ailleurs, je ne ne comprends toujours pas comment il fait...

VS10. Le contact avec le public est il quelque chose d'important ou restez vous froids et distants ?
Oui, c'est quelque chose de primordial pour nous. Bien sûr, il n'y a pas de réel contact, étant donné que nous ne sommes pas un groupe très " chaleureux ", mais nous essayons de faire passer quelque chose de très chaotique sur scène, et quand nous parvenons à amener le public à un état proche de la trance, nous sommes satisfaits. L'important pour nous lorsque nous jouons live, c'est de parvenir à communiquer notre haine mystique au public, qu'il la sente, qu'elle soit presque palpable. Donc il y a une certaine communication avec le public, nous ne restons pas froids et figés, et d'ailleurs je trouve que c'est une attitude qui convient très bien a Kraftwerk, mais pas du tout à un groupe de Metal.

VS11. pensez vous sortir un album live un jour dans votre carrière ?
Pourquoi pas ? Pour l'instant non, ce serait encore trop tôt je pense, mais si l'occasion se présente, que nous sentons une demande du public, nous le ferons. Nous avons déjà enregistré pas mal de concerts, et nous continuerons à le faire, l'avenir nous dira si cela mènera à quelque chose de concret... Mais d'une manière générale, je ne porte pas un grand intérêt aux albums live, à la limite, je préférerais sortir une vidéo, je trouve cela plus pertinent.

VS12. Peux tu me dire quelle est la signification de la photo qui illustre la pochette de votre nouvel album ?
Non.

VS13. Ton opinion sur les derniers Cradle of Filth et Dimmu Borgir ? Quel est le meilleur album de Black sorti cette année (à part le votre) ?
Pour Cradle of Filth, j'ai décroché après Dusk and her Embrace, donc je ne suis pas vraiment la personne indiquée pour en parler... Tout ce que je peux dire, c'est que je trouve la production absolument atroce, le jeu de batterie plutôt aléatoire, et le tout un peu bâclé, notamment au niveau des voix.
Je préfère de loin le dernier Dimmu Borgir, qui est extrêmement bien fait, même si je le trouve un peu creux et superficiel, un peu comme un gros blockbuster hollywoodien, genre Armageddon ou Independence Day.
Quant-au meilleur album de Black sorti cette année, je ne sais pas, je n'en ai pas écouté un qui ne soit pas complètement une grosse merde, à part CYFAWS d'Antaeus.

VS14. Un mot pour nos lecteurs ?
Vexilla Regis Prodeunt.

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